Absent des studios depuis près de vingt ans, le chanteur-producteur Linval Thompson fait son grand retour en sortant un album acoustique de 9 titres sur le label français Makasound. Il s’agit là du 3ème opus de cette collection, qui s’inscrit dans la suite logique des précédents (cf. Earl ‘’China’’ Smith et Kiddus I). L’idée de cette série est en effet de mettre en avant des chanteurs sur des compositions musicales acoustiques relativement épurées.
Pour rappel, Linval Thompson a fait ses premiers pas en studio à New York en 1972 au cours de son premier long séjour hors de Jamaïque. Il y enregistre et produit son premier morceau : Good gracious woman. De retour en Jamaïque, il travaille sur de nouveaux enregistrements avec les producteurs Lee Perry et Phil Pratt. C’est ensuite la consécration en 1976 avec Bunny Lee et le tube Don’t cut off your dreadlocks. A l’émergence du rub-a-dub à la charnière des années 70 et 80, Linval a sa place parmi les producteurs leaders de ce style que sont Jah Life, Henry ‘’Junjo’’ Lawes et son frère Melon. Il enregistre alors des albums avec tous les artistes de cette nouvelle scène à commencer par Barrington Levy (Poor man style), Eek-A-Mouse, Tristan Palmer, Sammy Dread, Barry Brown, ou encore Wayne Wade. Mais également avec des anciens comme Johnny Osbourne, The Viceroys, The Meditations, Horace Andy, Freddie McGregor, ou Freddie McKay… Ces productions lui offrent des succès internationaux retentissants. Au milieu des années 80, à l’ère du digital, Linval Thompson quitte la production et se contente par la suite d’exploiter son catalogue, jusqu’à aujourd’hui…
Il nous présente ainsi son nouvel album Inna de yard, enregistré à Kingston, pour lequel il s’est entouré de grands noms de la musique jamaïcaine tels que Earl ‘’China’’ Smith (guitare), Kiddus I (percussions), Jah Youth (percussions), Lloyd Palmer (clavier), Derrick Hinds (cuivres), etc.
Les morceaux qui composent cette session acoustique sont pour l’essentiel des reprises de classiques du chanteur. On redécouvre Good gracious woman, Jah Jah dreader than dread, Train to Zion ou encore le rare Inna de hills, dont les versions sont parfois légèrement différentes de la version originale, c’est le cas notamment pour le titre Jah guiding star. De nouveaux morceaux ont également été composés pour l’occasion, tel que Mercy mercy mercy, Hit them with the one drop, ainsi que le titre qui conclu l’album, Gimme Back. Il s’agit là d’un long morceau (plus de 12 mn.) où l’on retrouve en invité Israel Voice pour une très belle combinaison particulièrement roots.
En effet, l’ensemble des compositions de L. Thompson, qu’elles se trouvent sur Inna de yard ou sur d’autres opus, reflètent l’esprit roots et mystique de leur auteur. Les thèmes rastas sont récurrents : Jah, la Ganja, les Dreadlocks, etc… Pour lui, la musique reggae est indissociable de la religion Rastafari.
Un autre thème semble également important aux yeux du chanteur, il s’agit des femmes. En effet, on retrouve sur Inna de yard le premier titre composé par Linval, Good gracious woman, qu’il rechante ici pour la 1ère fois. On se souvient aussi du classique Shouldn’t Lift Your Hand (sorti en 1983 sur l’album Baby Father) qui condamne les violences subies par les femmes.
L’album Inna de yard constitue ainsi un projet intéressant où l’on redécouvre une partie de son œuvre, et notamment des grands classiques, en version acoustique. On peut toutefois regretter le fait qu’il ne soit seulement composé que de 9titres, et que le chanteur-producteur ne nous offre pas plus de nouvelles compositions…Toutefois, le retour de cette belle voix du reggae reste un plaisir pour nos oreilles, d’autant plus avec ce type de production qui a pour vocation de mettre les talents du chanteur au tout premier plan.
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Annietha Gastard, février 2006.